Ruches fabriquées et exploitées par des résidents d'Argos

Argos Report 2015

Rapport d’activités

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«Le travail tend parfois vers la réduction des risques.»

Mauro Poggia

Message de Mauro Poggia, conseiller d'Etat en charge du Département de l'emploi, des affaires sociales et de la santé.

Fondée à l’origine pour aider des personnes en rupture à retrouver rapidement leur rééquilibrage au sein de la société, l'association Argos est confrontée, depuis plusieurs années, à une réalité qui l'oblige à repenser ses concepts pédagogiques et à repositionner ses programmes sur le terrain. Le contexte actuel est complexe et exigeant. Le parcours des personnes qui sont adressées à l’association est très volatile. Argos doit tenir compte de la situation sanitaire et sociale de chacune d'entre elles, une situation souvent très précaire. Cela nécessite des stratégies de plus en plus individualisées. Si Argos connaît aussi de belles situations qui se résolvent de manière positive, une constante émerge : même pour ces cas-là, il faut du temps, beaucoup de temps – parfois plusieurs années – pour que ces personnes s'en sortent. Bien qu’elle dispose d’une palette de prises en charge étendue, le travail d’Argos tend parfois vers la réduction des risques, en s’éloignant des traitements à proprement parler. De plus, les problèmes d’addiction peuvent s’accompagner de troubles associés de la personnalité, obligeant Argos à repenser son travail et l'accompagnement de ses équipes en termes de sécurité.

«Je félicite l’association pour sa capacité de vision et d'anticipation.»

Argos a engagé en 2015 une profonde réflexion pour son développement

Alors que le rythme de la société s’est accéléré et que les pontages se font de plus en plus difficilement, d'autres facteurs tels que le vieillissement démographique mais aussi un contexte économique et social de plus en plus tendu, sont autant d’obstacles pour l'association, notamment dans la recherche d’emplois et de logements stables pour ses bénéficiaires. Face à ces défis, Argos a engagé en 2015, une profonde réflexion en vue de consolider les bases de son développement futur. Un bureau externe a été mandaté pour étudier son positionnement dans le dispositif socio-sanitaire genevois et pour l’aider à adapter ses modes de fonctionnement. Cette démarche sera prise en compte dans le cadre du renouvellement de son contrat de prestations en 2017 et je félicite l’association pour sa capacité de vision et d'anticipation ainsi que pour ce qui constitue une force et un atout : savoir travailler de manière efficace au centre d'un vaste réseau de partenaires, très hétérogène et dynamique. Malgré une météo très instable, Argos vogue par tous les temps et garde le cap qu'elle s'est fixé. Je salue cette volonté d'aller toujours de l'avant. Je remercie chaleureusement tous les membres de l'équipage de leur formidable engagement. Qu’ils soient tous assurés de ma confiance et mon soutien, de même que ceux de mon département.

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«Dans cette société morcelée, où l’individu l’est autant, Argos relève avec succès le défi de la globalité.»

Liliane Maury Pasquier

Tisser des liens

La logique des compartiments règne sur nos sociétés modernes. Les savoirs y sont si pointus que cela creuse des fossés entre les différents domaines. L’information, si rapide et omniprésente, réclame une attention constante et, partant, dresse entre les gens des téléphones intelligents. La performance est si sacrée qu’une muraille doit protéger l’activité professionnelle des incursions de la vie privée et des assauts des émotions : gare à celles et ceux qui connaissent des fissures ! Dans cette société morcelée, où l’individu l’est autant, Argos relève avec succès le défi de la globalité. Ses professionnel·le·s accueillent et accompagnent dans toutes les dimensions de leur vie des femmes et des hommes touchés par l’addiction : les aspects somatiques, psychologiques, sociaux et économiques sont tous pris en compte. Dans la prise en charge thérapeutique, la restauration des liens sociaux et familiaux joue un rôle essentiel : Argos vise l’intégration socio-professionnelle des personnes confrontées à des problèmes de toxicodépendance et s’adresse aussi à leurs proches.Cette vision globale de la personne exige des compétences multiples, que le personnel d’Argos n’a de cesse de perfectionner. Elle suscite également des collaborations avec divers secteurs, acteurs et actrices : par exemple, avec les partenaires du domaine de la justice et de la prison, de l’insertion professionnelle, du réseau médical ou encore des services sociaux. L’attention portée au parcours de chacun·e et l’approche ciblée de l’addiction demandent en outre une capacité d’adaptation constante et un accompagnement de haute qualité.

«Dans la prise en charge thérapeutique, la restauration des liens sociaux et familiaux joue un rôle essentiel.»

Une nouvelle certification pour Argos

Une qualité qu’en 2015, une nouvelle certification est venue confirmer. L’analyse institutionnelle des prestations d’Argos effectuée en parallèle donnera de nouvelles impulsions à la poursuite du travail de l’association en 2016 puis, dès 2017, dans le cadre du prochain contrat quadriennal de prestations avec l’État de Genève. Je souhaite ici remercier très chaleureusement M. Poggia, chef du Département de l'emploi, des affaires sociales et de la santé, ses collaboratrices et collaborateurs, ainsi que les autorités des communes de Carouge, Collonge-Bellerive, Lancy, Meyrin, Perly-Certoux, Plan-les-Ouates, Satigny et Veyrier. Un très grand merci aussi aux membres du comité d’Argos et à l’équipe de professionnel·le·s, dont l’engagement sans faille au service des usagères et usagers d’Argos contribue, dans cette société de séparations, d’isolement et d’exclusion, à (re)tisser des liens.

«Plus le seuil d’accueil baisse, plus le niveau de formation des professionnels doit s’élever.»

Hervé Durgnat, directeur d’Argos

Une année de réflexion sur l'évolution de l'association

L’année 2015 a enregistré une légère hausse de la fréquentation des structures d’Argos. Le taux d’occupation a presque atteint les 80%, contre 70% en 2014. De fait, la durée moyenne des séjours au centre résidentiel Le Toulourenc est actuellement de 600 jours. Mais il faut intégrer dans ces chiffres deux très longs séjours terminés fin 2015, qui se sont déroulés sur cinq années, souligne Hervé Durgnat. Face à une population vieillissante ou qui a vieilli prématurément en raison de conditions de vie précaires, le personnel éducatif d’Argos est amené à compléter ses connaissances. « Nous nous équipons pour faire face à des situations de grande souffrance psychologique, somatique, sociale et économique », indique le directeur d’Argos.

«Aucun acte de violence n’a été déploré en 2015.»

Apprendre à prévenir la violence

Autre enseignement proposé en 2015, celui consacré à l’approche préventive de la violence. Les cours se sont déroulés sur 9 jours et ont rencontré un vif intérêt auprès de l’ensemble des travailleurs d’Argos. En 2014, plusieurs agressions verbales et physiques avaient été à déplorer dans l’institution. « La formation a permis d’emmagasiner des connaissances sur la posture à adopter face à une situation de violence et sur l’environnement dans lequel elle se déclenche », raconte le directeur. Elle a aussi permis de répondre à certaines inquiétudes. De fait, aucun acte de violence n’a été déploré en 2015. Enfin, l’année 2015 a donné lieu à un gros effort de réflexion sur l’évolution de l’association. Argos a bénéficié d’une analyse institutionnelle de ses prestations. Celle-ci a été réalisée par le bureau d’étude Serdaly&Ankers, spécialisé dans l’action publique dans les domaines de la santé et du social, notamment. Objectif de cette démarche : mieux répondre aux nouveaux besoins et se repositionner dans le dispositif genevois de l’addiction. Ce travail au long cours déploiera ses effets dans le prochain contrat quadriennal de prestations d’Argos, qui débutera en 2017.

«Le travail avec la justice permet de soutenir les magistrats. Face à des problèmes d’addiction, ils ne sont plus tout seuls.»

Suzanne Michaud, responsable du centre de jour l’Entracte

Argos fait le lien entre prison et prise en charge thérapeutique

En 2015, le centre de jour l’Entracte a resserré sa collaboration avec les partenaires du domaine de la justice et de la prison. Des visites régulières ont lieu auprès de détenus afin d’évaluer l’indication d’un passage dans un centre résidentiel et que celle-ci soit comprise de chacun, détenu, avocat et assistant social. En 2015, ce travail a débouché sur deux entrées au CRMT mais également sur des refus. Les personnes détenues font appel à Argos alors qu’elles se trouvent durant la période d’instruction, voire après la sentence. Le Tribunal d’application des peines statue sur une entrée au CRMT. Au moment de la sortie, un éducateur d’Entracte cherche la personne en prison. Le passage en institution est prévu par l’article 60 du Code pénal alors que l’article 63 prévoit un traitement ambulatoire.

«La collaboration avec les procureurs débouche sur des réponses plus adaptées à chaque situation.»

Gérald Thévoz, éducateur au centre de jour

L'ensemble de la démarche pénale est plus cohérente

« La possibilité d’avoir des contacts avec les procureurs représente une nette amélioration dans l’évaluation des situations pénales et des réponses sociothérapeutiques mise en œuvre. Ils sont contents de ce soutien, car cette collaboration débouche sur des réponses plus adaptées à chaque situation et donne une cohérence à l’ensemble de la démarche pénale » indique Gérald Thévoz, éducateur au centre de jour. Dans l’institution, le suivi pénal continue en collaboration avec le Service d’application des peines et des mesures. En cas de non-respect d’une règle, un retour à Champ-Dollon peut avoir lieu.

Entracte gère aussi les suivis post-résidentiels, qui sont statistiquement en augmentation.

Visites au parloir

Des demandes pour un suivi thérapeutique émanent aussi des avocats et du Service social de la prison, indique Suzanne Michaud. Les éducateurs spécialisés d’Argos sont donc amenés à rendre visite à des détenus dans le cadre de parloirs professionnels, seuls ou en présence d’un-e assistant-e social-e de la prison. En 2015, une quinzaine de ces visites ont eu lieu. En dehors des problématiques carcérales, Entracte gère aussi les suivis post-résidentiels, qui sont statistiquement en augmentation. En 2015, ce sont cinq situations de ce type qui ont nécessité une collaboration active d’Argos avec l’Hospice général et les curateurs et curatrices du Service de protection de l’adulte. « Il est important de favoriser un travail où l’on peut se soutenir entre professionnels autour de situations sociales compliquées », explique la responsable du centre de jour.

«Nous accompagnons les résidents dans leurs démarches administratives. Des solutions sont possibles, même si les situations sont complexes.»

François Hollinger, responsable du Centre RÉSIDENTIEL à moyen terme (CRMT)

Redonner confiance aux usagèr-e-s face aux administrations

Avant, les résident-e-s qui arrivaient au CRMT devaient suivre un programme commun. Désormais, les éducatrices et éducateurs spécialisés de la maison répondent à des demandes plus individuelles, qui font l’objet d’une co-construction. En 2015, un résident, chez qui les groupes de parole provoquaient des états anxieux, a trouvé une prise en charge mieux adaptée. « Des séances de sophrologie l’aident à vivre des situations de stress sans recourir systématiquement à des substances », rapporte François Hollinger. Autre cas, celui d’un résident qui a quitté les activités de la maison durant quelques semaines pour rénover son appartement, afin de pouvoir le sous-louer. Cette démarche, appuyée par l’équipe du CRMT, a permis à cette personne de conserver son bail.

Argos estime que le besoin accru d’accompagnement des résidents est aussi lié à une surcharge de travail chez les assistantes sociales de l’Hospice Général.

La question de la migration prend plus de place

Il s’avère que la confrontation des usagèr-e-s au monde « organisé » devient de plus en plus difficile pour des raisons liées à la maîtrise du français ou à la difficulté de comprendre les termes utilisés par l’Etat, les assurances, les médecins, etc. Les éducatrices et éducateurs accompagnent de plus en plus les résident-e-s, notamment pour le renouvellement de leur permis de séjour. « L’attente de ce document, qui est obligatoire pour recevoir un financement du séjour, est une source d’anxiété », relève le responsable du CRMT. Agros estime que ce besoin accru d’accompagnement est également lié, par rebond, à une surcharge de travail chez les assistantes sociales et les assistants sociaux de l’Hospice Général. La partie des usagèr-e-s issue de la migration représente aujourd’hui entre 70 et 80% des résident-e-s. « Ces personnes éprouvent souvent des sentiments d’injustice vis-à-vis de la société. C’est le cas, par exemple, avec des Européens du sud élevés par leurs grands-parents et qui se sont soudain retrouvés projetés en Suisse auprès de leurs parents pour travailler. C’est une expérience violente, qui crée de la révolte », illustre François Hollinger. Tous ces efforts auprès de personnes ayant perdu toute assurance, et qui doivent tout reprendre à zéro, montrent qu’il est le plus souvent possible de trouver des arrangements avec l’administration, constate le responsable du CRMT.

«L’accompagnement d’une mère et de sa fille au Toulourenc a mobilisé les résidents. C’est une victoire par rapport à un placement de l’enfant dans une institution.»

Pierre Mancino, responsable du Toulourenc

Répondre à des demandes plus précises sur les psychotropes

En 2014 et en 2015, l’équipe éducative et les usagèr-e-s du Toulourenc auront vécu une première : accueillir dans la maison de Troinex une mère et sa fille, née durant le séjour de cette femme. « Cette situation a demandé un investissement de tous les instants et a suscité un sentiment de responsabilité accru », raconte Pierre Mancino, le responsable du Toulourenc. « Participer à la venue d’un enfant en foyer et garantir son bon développement a représenté une grande joie. Parallèlement, un questionnement éthique permanent s’est posé », ajoute le directeur. Il s’est avéré au final que la présence de carences n’exclut pas qu’une mère puisse remplir son rôle auprès de son enfant. « L’intervention d’Argos, qui a joué un rôle de pivot vis-à-vis du réseau socio-médical genevois, a permis d’éviter à cette femme un placement d’office de son enfant », souligne Pierre Mancino. La petite famille a quitté la maison fin décembre pour intégrer un appartement et développer un projet familial.

La durée moyenne des séjours au Toulourenc s’établit à environ deux ans et demi.

Approche ciblée des addictions

Les éducatrices et éducateurs du Toulourenc font face à des personnes qui revendiquent de plus en plus une approche ciblée de leur addiction. « Je peux consommer de la cocaïne, mais pas d’héroïne. J’aimerais que vous m’aidiez vis-à-vis de ce problème ». Voilà une demande qui peut être exprimée. « Il devient nécessaire de comprendre les addictions en tenant compte des différents produits utilisés, de leur dangerosité pour chaque individu et des problèmes crées par leur consommation en termes de santé ou d’insertion sociale», décrit Pierre Mancino. Une piste ? Travailler l’abstinence face à un produit, et la réduction des risques pour un autre, imagine le responsable du Toulourenc.En 2015, le Toulourenc a accueilli près de 10 personnes en moyenne, avec une fourchette d’âge allant de 35 à 50 ans. La durée moyenne des séjours s’établit désormais à environ deux ans et demi, dans un contexte où les conditions de la réinsertion sociale deviennent de plus en plus difficiles. Durant ces dernières années, la nécessité de rénover le Toulourenc s’est faite de plus en plus pressante. Il s’agit de proposer aux usageèr-e-s des chambres individuelles, confortables et d’installer de nouveaux bungalows.

«Consommer des psychotropes n’empêche pas de travailler. Il y a une nécessité à lutter contre la stigmatisation des personnes qui ont un problème de toxicomanie.»

Sabine Zuliani, responsable des ateliers et de la réinsertion professionnelle

L’expérience d’Argos dans la réinsertion professionnelle s’ouvre à des partenaires

En 2015, le taux de participation aux quatre ateliers d’Argos – menuiserie, rucher, potager, entretien jardin - s’est élevé à 97%, soit une occupation presque complète des douze places de travail fournies quotidiennement. Les ruches entretenues par les résidents ont produit 70 kilos de miel. «Afin d’augmenter nos forces sur la menuiserie et l’entretien de nos parcelles, nous avons décidé de réduire les contrats d’entretien extérieur», précise Sabine Zuliani, responsable du secteur ateliers et réinsertion. En 2015, l’institution a créé une place destinée à une mesure d’activité de réinsertion (ADR). « Ce système permet à un bénéficiaire de l’Hospice général de venir travailler dans nos ateliers avec l’objectif de retrouver un rythme dans sa journée, d’améliorer son savoir-être professionnel, de renforcer ses liens sociaux », résume Sabine Zuliani. C’est une façon pour l’Hospice général de faire découvrir Argos à des personnes souffrant de problèmes d’addiction.

Une formation addiction d’une demi-journée a été donnée aux 140 conseillèr-e-s en personnel de l’Office régional de placement de Genève.

Un plus pour l’Hospice général

« L’idée de cet ADR, c’est aussi de montrer que consommer des psychotropes n’empêche pas forcément de travailler. C’est un plus pour les assistantes sociales et les assistants sociaux de l’Hospice général qui savent que, dans des institutions non-spécialisées, une personne qui consommerait serait mise de côté et ne ferait rien. Au contraire, ici, nous sommes équipés pour aborder ces questions avec les personnes intéressées», explique Sabine Zuliani. Autre collaboration d’Argos avec le monde de l’insertion professionnelle : une formation addiction d’une demi-journée donnée aux 140 conseillèr-e-s en personnel de l’Office régional de placement de Genève (ORP). Le programme a été élaboré en lien avec le Groupe romand d’études des addictions et avec la collaboration de Kim Carrasco, collaborateur scientifique auprès de la Fondation vaudoise Le Relais. «Comment aborder le sujet - tabou - de la toxicomanie quand on ne connaît rien à ce sujet: c’est l’objectif central de cette formation», résume la formatrice. Cette ancienne employée de l’ORP estime que la société pourrait créer des endroits accueillants réservés aux personnes ayant eu un long parcours dans la toxicomanie. Un tel lieu permettrait d’éviter «la catégorisation et la sélection, qui semblent inévitables dans un système où les places menant à un suivi personnalisé sont limitées et où les bénéficiaires n’ont pas tous les mêmes capacités à s’en sortir», juge Sabine Zuliani, citant un dossier de l’Association romande et tessinoise des institutions d’action sociale.

«Un des résultats de l’abstinence est que les gens ont tendance à compenser un vide en mangeant. Il y a des choses à entreprendre à ce sujet.»

Aline Iacoviello-Villard, infirmière de liaison chez Argos

Un espace pour aborder des questions de santé masquées par la drogue

L’entrée de personnes dans un centre résidentiel offre la possibilité de faire le point sur toutes les questions de santé. Aline Iacoviello-Villard, infirmière de liaison d’Argos, accompagne donc des gens dans des démarches « qu’ils n’auraient pas faites à l’extérieur », dit-elle. Les situations médicales sont nombreuses et variées : plaies, problèmes gynécologiques, dentaires, douleurs articulaires ou dorsales, hépatites. La précarisation des usagèr-e-s et, dans certains cas, leur vieillissement prématuré débouchent sur des situations où une prise en charge hospitalière est nécessaire. Il s’agit non seulement d’accompagner les usagèr-e-s dans toutes les étapes d’un traitement mais aussi d’expliquer les situations aux éducatrices et éducateurs spécialisés d’Argos, rapporte l’infirmière de liaison. Un des problèmes qui s’exprime à l’intérieur des résidentiels est celui de la prise de poids. «Nous avons des gens qui font l’expérience de l’abstinence et, très souvent, ils compensent en se remplissant avec de la nourriture», note Aline Iacoviello-Villard. Car pour des personnes qui ont vécu longtemps dans la précarité, sans aucune régularité de vie, réaliser un repas équilibré n’est pas un objectif qui va de soi, souligne cette professionnelle. « Or une action serait souhaitable, car les prises de poids peuvent entrainer à leur tour des pathologies. »

«Les situations médicales sont nombreuses et variées : plaies, problèmes gynécologiques, dentaires, douleurs articulaires ou dorsales, hépatites.»

Aline Iacoviello-Villard, infirmière de liaison chez Argos

En 2015, l’ensemble des professionnel-le-s d’Argos a suivi une formation à la réanimation. «Les gestes appris peuvent répondre à un infarctus ou à une overdose. La formation répond à une demande des équipes, qui font face à une population à risques.» De fait, Argos a connu deux situations d’overdose en 2015. Heureusement, les personnes concernées ont pu être secourues par les équipes avec l’appui du 144. La mise en place de défibrillateurs dans les résidentiels et au Centre de jour est programmée. Vis-à-vis de l’extérieur, l’infirmière de liaison continue d’informer régulièrement les institutions médicales genevoises, ce que le tournus des médecins rend nécessaire. C’est le cas, par exemple, avec le personnel de l’Unité de transition hospitalière en addictologie des HUG, à Belle Idée, où passent nombre d’usagèr-e-s pour un traitement avant une entrée au CRMT. « Nous leur expliquons le passage de l’hospitalier vers le résidentiel », résume Aline Iacoviello-Villard.

«Notre auditeur a souligné que, dans le domaine de l’addiction, l’approche d’Argos était unique à Genève.»

Gérald Thévoz, responsable de la démarche qualité

En 2015, Argos a analysé son fonctionnement en profondeur

L’an passé, Argos a vécu avec succès sa 4ème certification qualité. L’auditeur d’Argos a rencontré les cadres de l’institution et des professionnel-le-s. Objectif : vérifier que le travail de l’association répond bien aux exigences des normes ISO 9001-2008 (et prochainement ISO 2015) et QuaThéDA 2012 (pour Qualité Thérapie Drogue Alcool). L’auditeur a souligné «la sincérité, le professionnalisme, la motivation (…) et l’engagement des collaborateurs rencontrés». Il note aussi le fait qu’Argos présente des prestations qui permettent de répondre à une palette de besoins extrêmement large à travers les cinq domaines de prestations reconnus, à savoir l’addiction, la santé, l’insertion sociale, l’intégration professionnelle et l’approche de la famille, ascendante et descendante», souligne l’auditeur.

«Argos n’est pas au service des normes qualité, mais elles peuvent nous aider à améliorer notre manière de gérer nos ressources.»

Gérald Thévoz, responsable de la démarche qualité

Un choix stratégique

Autre point positif relevé par cette analyse, le choix stratégique du comité et de la direction d’Argos d’engager une analyse institutionnelle de ses prestations et de son positionnement. Cette opération en profondeur, où l’avis du comité, des professionnel-les, des usagèr-e-s et des différents partenaires a été sollicité, a été menée en 2015 par une entreprise externe (Serdaly & Ankers).« Argos n’est pas au service des normes qualité, mais elles peuvent nous aider à améliorer notre manière de gérer nos ressources », rappelle tout de même Gérald Thévoz. Les pistes relevées par le management de la qualité et l’analyse menée en 2015 par l’entreprise externe seront utilisées pour faire évoluer Argos dans le cadre de son prochain contrat de prestation 2017-2020. Il s’agit de répondre à un public confronté à des difficultés croissantes et à des problèmes toujours plus complexes, résume le responsable qualité. L’opération nécessite une collaboration accrue avec l’ensemble du réseau social, assuranciel, médical, juridique, où Argos joue, dans le domaine de l’addiction, un rôle de pivot, selon sa direction.

Nous exprimons nos remerciements

Au Département de l’emploi, des affaires sociales et de la santé, pour le soutien qu’il apporte à notre activité depuis 35 ans.

Au Service des sports de la Ville de Genève pour la mise à disposition des installations sportives.

À la commune de Troinex, pour le soutien qu’elle manifeste à notre résidentiel Toulourenc et à l’offre de travail à nos résidant-e-s.

À l’Eglise arménienne pour l’offre de travail à nos résidant-e-s.

Au communes de Carouge, Collonge-Bellerive, Lancy, Meyrin, Perly-Certoux, Plan-les-Ouates, Satigny et Veyrier;

Médecine communautaire;

Association Partage;

Dons anonymes;

Membres de l’Association.

Ces remerciements s’adressent également à toutes les personnes qui de près ou de loin soutiennent notre action.

Les personnes suivantes ont collaboré à la réalisation de ce rapport : Liliane Maury Pasquier, présidente d'Argos;
Hervé Durgnat, directeur;
Pierre Mancino, Sabine Zuliani,
François Hollinger, Suzanne Michaud,
Gérald Thévoz, Aline Iacoviello Villard et Candy Shorrock.

Rédaction textes/images :
Stéphane Herzog

Conception et création :
Buxum Communication,
www.buxum.ch

Photos :
Jean-Michel Etchemaïté