Dans le présent document, les termes employés pour désigner des personnes sont pris au sens générique ; ils ont à la fois valeur d’un féminin et d’un masculin.
Faire du monde d’après une courbe d’espoir
Plus jamais comme avant. Cette formule temporelle comparative, nous l’avons passablement lue ou entendue depuis un an. Elle entend souligner qu’il y avait un avant et qu’il y a désormais un après-Covid, quand bien même la pandémie nous impose encore ses contaminations, ses restrictions et ses doutes. Mais alors, de savoir si le monde de demain sera, à terme, meilleur ou non que le monde d’hier, l’on se garde bien de le préciser. Une part de réalisme oblige à admettre que la dépendance aux psychotropes continuera de poser un défi majeur sur le plan sanitaire et social.
La solitude, l’angoisse, l’inconnu devant soi, quand ce n’est pas une inévitable dégradation du contexte économique et social genevois, sont autant de facteurs de risques pour celles et ceux dont la trajectoire de vie est heurtée par une addiction.
Autant d’indicateurs qui laissent penser que le monde d’après ne sera, en bien des points, pas si différent. À nous de saisir l’occasion de ce bouleversement pour corriger ce qui doit l’être. Et maintenir vivace ce qui honore notre société. La solidarité collective démontrée en 2020 m’aura profondément marqué. Le travail d’Argos en est un exemple indéniable. En 2020, cette association d’aide aux personnes toxicodépendantes a maintenu les admissions en résidentiel, malgré la pandémie. Elle a poursuivi son activité visant à permettre à ses bénéficiaires de stabiliser leur situation personnelle, de retrouver leur place et leur rôle de citoyen.ne à part entière, et même d’imaginer un retour à une vie professionnelle. La signature d’un bail pour un appartement en ville offre de nouvelles clés aux bénéficiaires dans le but de développer leur inclusion dans la cité.
Tracer un chemin de vie implique de faire se succéder lignes et courbes. Si les lignes droites peuvent symboliser des moments empreints de sérénité, les courbes caractérisent les phases de changement et de bouleversement. Notre monde a sans doute vécu à son échelle une courbe à partir du printemps 2020. Des courbes qui pourraient également caractériser certaines phases des personnes connaissant des addictions. Ces courbes toutefois illustrent aussi la quête de sens et de réponses. Des réponses qui ne peuvent venir qu’avec le soutien et l’accompagnement des éducateurs et éducatrices, des infirmières et même désormais d’un animateur socio-culturel transversal aux pôles de prestations, sans oublier le rôle fondamental de l’encadrement et de la direction d’Argos. Qu’ils et elles soient vivement et profondément remercié.e.s. Grâce à ces personnes, ces courbes se muent ainsi en source d’espoir.
Je le disais déjà voici deux ans, la dépendance aux psychotropes pose la question de la place que notre communauté humaine donne aux personnes fortement fragilisées et en besoin de soins médico-sociaux. Depuis plus de 40 ans, Argos y répond avec professionnalisme en hébergeant, en offrant des places en atelier et en protégeant les usager.ère.s. Je suis ravi que nous ayons pu reconduire le contrat de prestation qui lie l’État de Genève et Argos. L’inclusion dans le contrat de prestation de 3 places de type établissement pour personnes handicapées est encore à saluer.
Une nouvelle fois, je veux mettre en avant toutes celles et tous ceux qui font de l’association Argos un lieu d’opportunités et d’espoir. À un tournant comme celui que nous vivons, cet engagement démontré en 2020 mérite notre entière reconnaissance. Notre confiance dans le monde d’après s’en retrouvée renforcée.
Thierry Apothéloz, Conseiller d’État
Comme pour tout un chacun et l’ensemble des structures sociales, la Covid-19 a marqué le quotidien d’Argos en 2020. Des plans de protection ont été mis en place et adaptés à plusieurs reprises, afin de garantir au maximum la préservation de la santé des résident∙es vivant au CRMT et au Toulourenc, tout comme celle des collaboratrices et collaborateurs. Les solidarités renforcées entre le secteur ambulatoire et les résidentiels ont été importantes pour assurer ce quotidien. Mes remerciements chaleureux à toutes ces personnes qui se sont mobilisées pour rendre la situation supportable. Les équipes ont mené un excellent travail, les prestations se sont poursuivies, le lien avec les bénéficiaires a été maintenu et parfois renforcé.
2020 était aussi la première année de fonctionnement de notre nouvelle équipe de direction, qui a magnifiquement réalisé cette transition, tout en étant confrontée à cet enjeu supplémentaire du coronavirus. La Covid-19 qui met d’autant plus en évidence les problèmes sociaux, la précarité, l’instabilité psychique et sociale auxquels n’échappent pas les personnes concernées par des problèmes liés aux addictions.
Depuis toujours, Argos vise à s’adapter à l’évolution de la situation sociale et à anticiper au mieux les défis qui se présentent, via un accompagnement professionnel de la plus grande qualité. Ceux-ci nous obligent régulièrement à revoir nos modalités d’accueil et surtout d’accessibilité à nos structures résidentielles.
La thématique du logement est plus que jamais d’actualité. On le voit avec les réponses développées par les autorités et certains partenaires du réseau pour faire face à la situation des personnes sans abri. Pour sa part, Argos a commencé à investir dans la mise à disposition d’appartements dans la cité. Pour certains, le saut entre le résidentiel et le logement autonome s’avère trop élevé. Pouvoir momentanément bénéficier d’un soutien sur son lieu d’habitation permet de favoriser cette insertion sociale et de bénéficier de temps pour consolider son cheminement. Un de nos objectifs est de poursuivre nos démarches pour l’obtention et la mise à disposition de logements.
Le nouveau contrat de prestation 2021-2024 a été signé en fin d’année. Nous tenons à remercier les autorités pour leur soutien et leur confiance réaffirmée. Nous avons pu obtenir le financement possible de 3 places de type EPH (établissement pour personnes handicapées). Cela pourrait offrir un peu de répit quant aux récurrents soucis de financement des places en résidentiel. Par contre, la nécessité d’offrir des lits d’urgences pour favoriser l’accessibilité aux structures et de renforcer l’ambulatoire, de revoir le modèle de subventionnement et de facturation des places n’ont pas encore pu être prise en compte dans le présent contrat, mais ce n’est que partie remise.
J’aimerais terminer en remerciant sincèrement les membres du comité pour leur engagement, leur fidélité et leurs apports multidimensionnels qui font la richesse et la force de ce groupe, pour développer une vision stratégique cohérente.
Christophe Mani, président
2020 restera l’année de la pandémie de la Covid-19 mais aussi paradoxalement celle d’une prise de conscience de notre fragilité commune à toutes et à tous.
La solidarité a repris son sens et nous a ramené vers quelque chose d’essentiel dans la vie, la relation.
Dès lors, Argos a dû s’adapter et réagir vite afin de maintenir des prestations aux personnes qui souffrent d‘addictions dans un contexte si particulier.
Face à l’incertitude liée à l’évolution de la pandémie, un des axes prioritaires s’est orienté sur la préservation de nos ressources humaines afin de maintenir nos dispositifs en action. Un système de télétravail s’est organisé, les équipes ont planifié des horaires spécifiques tout ceci en s’appuyant sur les directives de l’OFSP, du médecin cantonal et de nos départements de tutelles.
Cette réactivité, mêlée à la créativité, nous a permis de maintenir des prestations qui ont su répondre aux besoins essentiels des personnes qui s’adressent à nous et poursuivre un travail de prévention. Les processus d’admission pour nos résidentiels ont fonctionné sans relâche répondant ainsi à une réalité, un besoin indéniable. Je remercie ici nos partenaires du réseau médico-psycho-social et judiciaire qui ont pu également se joindre à ces impératifs.
Fort de ce contexte, ce début d’année s’affichait sous le signe de la négociation du contrat de prestation 2021-2024. Celui-ci a été ratifié par notre Conseiller d’État au mois d’octobre. Argos s’ancre dorénavant dans les établissements EPH (Établissement pour Personnes Handicapées) avec trois places d’hébergement et occupation (HO) attribuées et subventionnées par le pôle assurances sociales et handicap du département de la cohésion sociale. Une ouverture à de nouvelles perspectives d’inclusion citoyenne pour des personnes en situation de handicap liée à leur dépendance nous attend et nous en sommes ravis.
Nous avons répondu favorablement à un projet pilote, « Handicap – Addictions », mené par le GREA (Groupement Romand et Études des Addictions) pour créer des supports didactiques auprès de personnes présentant un DIL (Difficulté intellectuelle légère) et confrontées à des problèmes liés à la consommation. L’addiction se révèle aujourd’hui transversale à l’ensemble de la population !
L’association poursuit en parallèle une réflexion sur la mutation et la plus-value des résidentiels avec la plateforme des fonctions dirigeantes en lien avec le GREA et Addiction France dans la perspective de tenir des assises franco-suisses du résidentiel au premier semestre 2022.
Cela démontre une envie constante de porter la réflexion sur notre pratique, se remettre en question, appréhender les enjeux et rester innovant. Envisager l’avenir ensemble sans oublier d’inscrire dans cette démarche nos acteurs essentiels et centraux : les bénéficiaires.
Je tiens à remercier notre comité pour son soutien et sa confiance en la nouvelle direction. Je tiens également à remercier les faitières Agoeer/INSOS pour leur engagement durant les vagues successives de la pandémie notamment par le déblocage de fonds pour l’obtention et la distribution gracieuse de matériels sanitaires.
Je salue vivement les collaborateurs.ices de terrain par leur professionnalisme qui ont su maintenir une qualité d’accompagnement auprès de nos bénéficiaires ; le collège de direction qui a pris par moment, il est vrai, une allure d’un PC (poste de combat) durant cette année.
Combat qui a permis d’accompagner et d’offrir de l’espoir, de la solidarité à toutes personnes qui gravitent autour et au sein de l’association Argos. Un grand Merci.
Richard Zalisz, directeur
L’année 2020 restera pour longtemps gravée dans nos mémoires…
Pour commencer, nous avons accueilli avec joie en janvier 2020 deux nouveaux collaborateurs. Un éducateur à 60 % et un animateur à 50%. L’infirmière de liaison a intégré officiellement notre équipe quelques semaines plus tard. C’est avec un grand enthousiasme que l’équipe de l’Entracte se modifie ainsi que son dynamisme.
Janvier et février ont été deux mois sous haute tension. Nous avons eu une fréquentation très importante avec beaucoup de sollicitations de la part de nos bénéficiaires. Pour exemple, nos moments de brunch qui sont deux fois par semaine nous ont permis de servir 100 repas au mois. Ceci n’est jamais arrivé dans l’histoire de l’Entracte.
Dans un premier temps, cette affluence nous a fait vivre une certaine euphorie. Aujourd’hui, avec du recul, cette situation n’aurait pas été tenable sur le long terme avec nos moyens.
Le 16 mars (confinement) est arrivé et l’accueil a dû être arrêté du jour au lendemain. La priorité a été de garder coûte que coûte le lien avec nos bénéficiaires et de maintenir les admissions résidentielles en cours ( 7 personnes) . En quelques jours nous avons dû tout réadapter : télétravail, basculement de notre centrale téléphonique sur nos portables, visioconférences, entretiens téléphoniques, etc.
Un gros travail de réseau avec nos partenaires médico-sociaux a pu être maintenu, mais pas sans difficultés, car tous les services étaient en télétravail.
L’Entracte a pu rouvrir son accueil en avril-mai, excepté les brunchs. Un important travail de réflexion a été mené autour de notre concept d’accueil. La place de l’animation et une présence renforcée de notre part sur ce pôle a pris tout son sens et son essor.
Nous n’avons pas voulu mettre en place une animation structurée (ex : ateliers divers avec horaire précis, etc.), mais plutôt une « dynamique d’animation ». Une animation « polymorphe », une animation qui a su répondre au plus près aux besoins et aux envies des bénéficiaires. Ce travail s’est fait avec beaucoup de finesse et d’inventivité.
Cela a eu beaucoup de succès. Nous avons pu mesurer tous les jours à quel point cette animation est un catalyseur du lien social. Ce lien social si important et si manquant dans la population qui nous fréquente. Un lien social qui a été gravement mis à mal avec la pandémie. Très peu de nos bénéficiaires ont été contaminés par la Covid-19, tant mieux. Ce constat est certainement en lien direct avec la pauvreté des relations sociales de nos clients. Pour certains qui nous fréquentent quotidiennement, cela leur a permis de redonner un peu de sens à leur journée.
Malgré la pandémie et son lot de difficultés, nos prestations globales n’ont cessé d’augmenter. Nous avons enregistré près de 3000 passages, donné environ 2500 entretiens et près de 80 nouvelles personnes sont venues pousser les portes de l’Entracte.
Un énorme travail a été fourni de la part de l’équipe de l’Entracte avec un engagement immense. Je tiens ici, tout spécialement, à les remercier très chaleureusement.
Pascal Dupont, responsable de l’Entracte
Qui de mieux, qu’un bénéficiaire pour parler de nos prestations. C’est pourquoi, cette année je donne la parole à Jérémy qui a bénéficié de nos prestations en semi-résidentiel de jour durant cette période particulière de pandémie. Je tiens à le féliciter pour son assiduité et à le remercier pour son investissement et sa disponibilité.
Sabine Zuliani, responsable des Ateliers
« Je n’avais aucune activité, mais j’avais un suivi au Caap Arve et c’est un infirmier qui m’a parlé d’Argos. Il m’a accompagné à l’Entracte où j’ai rencontré Antonin. J’ai pu lui expliquer pourquoi j’avais besoin d’un emploi : en fait il fallait que je remplisse les conditions pour obtenir un bracelet électronique. J’ai été rapidement rassuré qu’il y avait une possibilité et j’ai été visiter les ateliers d’Argos.
J’ai commencé mon séjour semi-résidentiel de jour aux ateliers d’Argos le 9 septembre 2019 et j’ai tout de suite été à l’aise avec les encadrants et l’atmosphère de travail. Le travail de menuiserie entrait bien dans ce que j’aime faire. Je sortais d’une période sans activité et du coup j’étais soulagé de pouvoir bénéficier du bracelet électronique en travaillant dans les ateliers d’Argos à la place d’entrer en prison. Les premières semaines étaient difficiles en termes de réveil. Il fallait casser un rythme où je n’avais pas d’horaires. Je me suis rendu compte du bénéfice d’avoir une activité et pas juste d’éviter la prison : retrouver un cadre, un rythme de travail et apprendre des choses sur la menuiserie, la nature. Je me suis aussi rendu compte que je n’aimais pas l’école, mais que j’adore apprendre, poser des questions.
Suite aux deux semaines de vacances de Noël, il m’arrivait régulièrement d’arriver en retard en raison de rechute et de me coucher un peu tard, mais petit à petit conscient du fait qu’il était obligatoire d’arriver à l’heure aux ateliers, je me suis donné les moyens de faire un effort. Suite à mes progrès, on m’a donné l’opportunité de faire le mandat de la déchèterie. Ça a été un bonus, car ce mandat est réservé aux bénéficiaires du résidentiel. Aussi je me suis rendu compte qu’on remarquait mes progrès et ça m’a donné l’opportunité de prouver qu’on pouvait me faire confiance.
16 mars 2020, la décision du Conseil Fédéral tombe : c’est le confinement….Les ateliers d’Argos ferment ça veut dire que mon activité aux ateliers s’arrête. Pas facile, car cette activité était mon seul lien social et à cela s’ajoute le port du bracelet électronique donc sorties très restreintes : 1h le samedi et le dimanche, le reste de la semaine j’étais confiné dans ma chambre. Durant cette période de confinement, j’ai gardé un contact avec mon référent de l’Entracte ce qui m’a permis de continuer à réfléchir sur ma situation et mes projets. J’ai toutefois mal vécu cette période de lock down, j’étais assez anxieux et l’environnement général était néfaste, j’avais de la peine à analyser la gravité de la situation. De plus, durant cette période les liens sociaux et les activités étaient rares, je ne pouvais plus faire de sport, ça a fini par jouer sur mon moral.
13 mai 2020 : reprise de l’activité aux ateliers ! content de retrouver les collègues et faire quelque chose, de pouvoir ressortir, mais néanmoins j’ai eu de la peine à m’adapter aux mesures covid qui changeaient sans arrêt. Toutefois, je me sentais libre en venant travailler, car le port du bracelet électronique m’imposait un horaire strict.
La menuiserie m’intéresse depuis tout petit, en arrivant aux ateliers j’ai découvert les bases de ce métier avec les maîtres d’atelier toujours présents pour répondre à mes questions malgré la charge de travail qui pèse sur eux. J’ai appris aussi à ranger ma place de travail, à prendre des initiatives et à améliorer ma ponctualité. J’ai beaucoup apprécié d’avoir l’opportunité de travailler aussi dans le secteur de l’apiculture et d’apprendre le fonctionnement d’une ruche et de participer à l’extraction du miel.
En juin 2020, Sabine me parle d’une possibilité d’un emploi dans une entreprise sociale. J’y ai réfléchi et pris conscience de l’importance de cette proposition. Durant l’été, elle m’aide à formuler un CV et une lettre de motivation dans le projet de présenter ma candidature à l’Orangerie. En même temps, mon activité aux ateliers continue avec les mesures contraignantes du port du masque, c’était pénible avec la chaleur et la poussière.
En août 2020, je rencontre un référent de l’Orangerie qui me présente le fonctionnement de cette entreprise et m’explique aussi qu’il serait possible de commencer un stage de trois mois avec la possibilité d’être engagé dans cette entreprise sociale.
Le 1er septembre 2020, toujours sous les mesures covid, je débute mon stage à l’Orangerie. Le premier jour a été difficile, car je devais être sur place à 6h30 ! Les jours passent et je m’habitue à ce nouveau rythme de travail et je prends ma place dans la boîte. Au bout d’un mois de stage, mon référent à l’Orangerie me propose déjà un contrat de onze mois dès le 1er octobre. En parallèle, j’ai continué à voir Antonin, mon référent à l’Entracte, ce qui est important pour moi, car il connait bien ma situation et que le courant passe bien.
Malgré les difficultés quotidiennes, le bracelet électronique, les rechutes occasionnelles, l’anxiété générale ainsi que les mesures liées au covid, j’ai gardé le cap et jour après jour j’ai continué à progresser pour avancer dans mon parcours et dans mes projets d’insertion professionnelle.
À ce jour, je suis toujours employé à l’Orangerie et en contact hebdomadaire avec l’Entracte pour continuer à travailler sur moi-même, mes addictions et mes projets futurs ».
Jeremy B.
2020 aura été une année particulière pour beaucoup d’entre nous. Malgré le contexte sanitaire difficile, le CRMT a continué à accompagner nos résidents.es dans leur projet de vie et je tiens ici à remercier tous les collaborateurs.trices du CRMT pour leur investissement. Je vous laisse le plaisir de lire le texte d’un de nos résidents.
Coraline Majoral, responsable du CRMT
« Je suis arrivé au CRMT en août 2020. Comme chaque résident, avant d’entrer au centre, je me suis fixé des objectifs liés à ma décision de devenir abstinent. Mes objectifs sont de remettre en place divers suivis médicaux, débuter le processus de réinsertion professionnelle et trouver un logement. En somme, devenir autonome, indépendant.
Le CRMT propose un cadre qui me permet tout d’abord d’expérimenter l’abstinence. Comme la villa Argos est située en dehors de la ville, cela m’a aidé à prendre de la distance avec mes anciens repères et mes connaissances liées au milieu de la toxicomanie. J’ai un référent avec lequel j’aborde tous les sujets qui me préoccupent. Il m’aide à atteindre les objectifs que je me suis fixés à mon entrée, mais surtout dans mon rapport au produit, mes comportements addictifs et la gestion de mes envies impulsives de consommer. Les autres accompagnants du CRMT sont aussi disponibles pour répondre à mes questions ou m’écouter lorsque j’ai besoin de parler.
Les premières semaines, je me rendais en atelier ménage (ou atelier cuisine) à 9h, après être passé à la pharmacie pour récupérer mon traitement de substitution. Cela m’a permis de reprendre un rythme, de ne pas penser au produit et de me sentir valorisé.
Les lundis, les mercredis et les jeudis à 14h, il y a un groupe humeur qui est animé par deux éducateurs. Lors des groupes, j’ai pu parler de mon vécu quotidien au CRMT et écouter les autres résidents.es. C’est une excellente manière d’avoir des échanges sincères et de mieux faire connaissance avec les résidents.es et éducateurs.trices.
J’ai aussi participé à quelques sorties de mise en mouvement organisé par les éducateurs.trices, lors desquelles j’ai eu l’occasion de faire de la marche ou du fitness à la salle du sport du CRMT. J’ai remis en place divers suivis médicaux, débuté mes recherches de logement et commencé le processus de réinsertion socio-professionnelle.
Après 6 mois au CRMT, j’ai bien avancé dans mes objectifs et, comme j’ai une place de stage à 70% et ne peux plus participer aux activités du centre, il a été proposé que je passe en semi résidentiel de nuit. Je peux toujours voir mon référent en entretien et les autres éducateurs.trices ainsi que le médecin, mais je ne participe plus aux diverses activités du centre. Je suis très satisfait de ce changement, car je gagne en autonomie ce qui est finalement mon objectif principal. Je garde toujours un bon lien avec les résidents.es et éducateurs.trices, même si je suis moins souvent dans la maison.
En résumé, je trouve que le CRMT est un lieu paisible qui offre énormément de possibilités aux personnes voulant expérimenter une période d’abstinence et se donner les moyens de vivre différemment. »
R.P (résident)
Cette année 2020 aura été bien particulière pour chacune et chacun d’entre nous.
Je tenais à ce que les personnes qui bénéficient d’un accompagnement par les professionnels du Toulourenc puissent vous partager un moment de leur parcours de vie déjà bien atypique en temps normal.
Vous allez donc pouvoir lire le témoignage d’une femme, Isabelle* 45 ans, arrivée au Toulourenc en 2016 après dix mois de séjour dans notre pôle résidentiel de court et moyen terme, le CRMT.
Isabelle vit depuis août 2020 dans un appartement protégé que gère le pôle résidentiel de vie à durée adaptée, le Toulourenc.
Nicolas Stock, responsable du Toulourenc
« Lorsque l’équipe du Toulourenc m’a proposé d’aller à l’appartement, j’étais à la fois très contente, très fière, mais également stressée. J’allais pouvoir refaire une nouvelle vie. L’équipe m’a aidée et beaucoup soutenue.
Je me suis sentie très stressée les premières semaines de vivre seule. La solitude du soir et personne à qui parler étaient des choses difficiles à vivre. Après je me suis habituée, j’ai réappris à m’occuper en faisant mon ménage, des activités de création de bijoux en perles, faire mes courses et me rendre seule à mes rendez-vous.
J’étais très fière de pouvoir accueillir mon fils, ma famille dans mon chez-moi.
« Mon chez-moi ! », au début je ne me sentais pas chez moi, mais maintenant je me sens bien dans cet appartement. J’ai pu un peu le décorer avec mes objets personnels.
J’ai besoin de l’équipe, mais beaucoup moins qu’avant. Je suis dans l’appartement depuis 5 mois et c’est une belle expérience après 5 ans de résidentiel (CRMT et Toulourenc).
Cette année 2020 aura été bien particulière et difficile par moment. Avec l’équipe je travaillais un départ vers un autre logement, mais la Covid-19 a tout arrêté. Cela a été compliqué car il fallait que j’attende…..
Au début je venais encore un peu faire des activités au Toulourenc comme de la pétanque dans le jardin, m’occuper de ma tortue qui profite du jardin, discuter avec des résidents.es, mais avec le temps c’est devenu plus dur. Les activités ont moins eu lieu, mon énergie a baissé, la vie s’est arrêtée. L’équipe passait me voir toutes les semaines, mon fils et ma famille aussi, mais à un moment je voulais voir moins ma famille car il y avait trop de problème et il fallait que je m’occupe de moi.
L’équipe du Toulou était un vrai soutien. Je pouvais parler de tout ça avec ma référente, « Ma Céline » toujours disponible et souriante. Elle m’a beaucoup aidé.
Avec tout ça je n’ai pas rebu d’alcool. Les idées étaient parfois plus fortes, mais je ne voulais pas tout casser, retourner à zéro. Pour ça je suis aussi très contente et fière car cela fait maintenant 3 ans que je n’ai pas bu une seule goutte d’alcool. »
*Isabelle, nom d’emprunt
La création formelle du team santé a vu le jour en 2020 avec notamment une adaptation des horaires des infirmières afin de répondre à notre mission première de coordination des soins. Le team santé cherche aujourd’hui à proposer une approche transversale de sa pratique tout en proposant une référence métier par pôle. Ainsi j’ai intégré le pôle ambulatoire du centre de jour l’Entracte en début d’année.
Cette année 2020 a été marquée par la crise de la covid-19. Avec le team santé nous avons dû faire preuve d’adaptabilité accrue face à cette situation exceptionnelle : suivi et mise à jour des recommandations dans les lieux de soins, disponibilité pour répondre aux questions tant des résidents.es que des collaborateurs.trices, approvisionnement en matériel dans les différents lieux, gestion des stocks de matériel mais aussi élaboration de protocoles de prise en charge. Ce fut une expérience dense et pleine d’enseignements que le team santé tente encore aujourd’hui de mener au mieux avec tous les collaborateurs.trices.
Collaboration réseau extérieur :
La collaboration avec le réseau genevois en addictologie a continué, mais de façon restreinte et par visioconférence. Par contre, nous n’avons pas pu proposer de présentations d’Argos en présentiel et nous réalisons à quel point celles-ci sont importantes pour nous faire connaître auprès de nos partenaires (médecins, assistants sociaux,..)
Nous continuons d’accueillir dans nos résidentiels des personnes bénéficiant du programme PEPS. Avec la crise sanitaire, nous avons dû nous adapter à l’accessibilité parfois restreinte du lieu de soins en acceptant de recevoir le bénéficiaire avec son traitement intramuros.
Plateforme hebdomadaire d’orientation et d’indication
J’anime et coordonne toujours l’espace d’échange hebdomadaire de la Plateforme. 40 entrées ainsi que 35 sorties ont été traitées. Malgré la crise sanitaire nous avons fait le choix de poursuivre la tenue de ces rencontres, mais par visioconférence, afin de pouvoir maintenir les admissions de bénéficiaires dans nos structures. Dans une année où la distanciation était de mise, cet outil a permis aux collaborateurs des différents pôles de rester en lien et d’avoir une réflexion collective sur les situations abordées afin de structurer le flux des bénéficiaires dans notre association.
Aline Iacoviello-Villard, infirmière de liaison
Comme chaque année la mission de l’association Argos a fait l’objet d’un audit de suivi en septembre 2020 et plus particulièrement, la direction, le pôle résidentiel de vie adapté « Le Toulourenc » ainsi que le pôle travail et insertion « Les ateliers ».
L’audit a été validé par la certification qualité SQS pour la norme ISO 9001 :2015 et QuaTheDA2012 sans aucune non-conformité.
Les améliorations recommandées par notre auditeur sont toujours d’une utilité avérée et nous y travaillons, afin d’être toujours attentif à la voix du client, à l’écoute des frémissements du monde, et ceci pour être mieux préparé au changement.
En 2020, un audit interne a été mené portant sur la sécurité au travail (incendie, violence, surconsommation d’un bénéficiaire). Nous avons constaté que les documents concernant la marche à suivre pour la prise en charge d’une personne sous psychotropes sont connus et bien utilisés par nos collaborateurs.trices. Par contre, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait trop de documents sur le risque incendie et que cela portait à confusion, nous avons donc revu l’ensemble des instructions de travail. Nous avons pu également améliorer les instructions de travail en ce qui concerne l’item sur la violence au travail notamment en introduisant une fiche d’incident.
Pour répondre aux normes SQS, chaque année, nous réalisons des questionnaires de satisfaction du personnel, des bénéficiaires et de nos partenaires. Les réponses données nous servent à l’amélioration continue de nos diverses prestations.
Prochain audit de re-certification ISO 9001 :2015 et QuaTheDa 2020 fixé sur deux jours en septembre 2021.
Candy Shorrock, responsable Système Management Qualité
Pôles résidentiels et semis résidentiels |
Le CRMT |
Le Toulourenc |
Total |
---|---|---|---|
Nombre de Places disponibles | 12 | 13 + 4 | 25 + 4 |
Journées facturées | 2522 | 4406 | 6928 |
Entrées effectuées | 22 | 18 | 40 |
Total des séjours | 28 | 27 | 55 |
Durée moyenne des séjours | 212 | 858 | 1070 |
Sorties effectuées | 22 | 13 | 35 |
En séjour au 31.12.2020 | 6 | 14 | 20 |
Taux d’occupation | 57.50% | 92.80% | 75,15% |
Pôle travail & insertion |
Les Ateliers |
---|---|
Nombre de places disponibles | 12 |
Taux d’occupation | 82% |
|
|
Pôle ambulatoire |
L’Entracte |
Nombre de places disponibles | 12 |
Nombre de passage/dossiers traités | 3446 |
Moyenne d’interventions par jour | 19 |
Moyenne d’entretien réalisé par jour | 12 |
Moyenne d’intervention administratives par jour | 8 |
Taux d’occupation | 115,8% |
Nous exprimons nos remerciements au département de la cohésion sociale pour le soutien qu’il apporte à notre activité. Au service des sports de la ville de Genève pour la mise à disposition des installations sportives.
Aux communes de Bardonnex, Cartigny, Grand-Saconnex et de Soral
La Loterie Romande
Médecine Communautaire
Dons Anonymes
Membres de l’associations
Ces remerciements s’adressent également à toutes les personnes qui de près ou de loin soutiennent notre action.
Les personnes suivantes ont collaboré à la réalisation de ce rapport :
Christophe Mani, président
Richard Zalisz, directeur
Candy Shorrock, assistante de direction
Pascal Dupont, Coraline Majoral, Sabine Zuliani, Nicolas Stock, Aline Iacoviello-Villard.
Conception et création :
Buxum communication, www.buxum.ch
Photos :
Vincent Zilioli